Qu’est-ce que le tritium retrouvé dans l’eau potable de l’agglomération angevine ?
Santé

Qu’est-ce que le tritium retrouvé dans l’eau potable de l’agglomération angevine ?

En fin d’année dernière, la Criirad (Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité) a mis en ligne des données permettant de connaître avec précision la présence de tritium, un élément radioactif, dans l’eau potable. La région angevine est la plus impactée en France.

eau du robinet

Le tritium est présent dans l’eau potable – © Fotolia

À de nombreuses reprises, le tritium, cet élément radioactif rejeté par les centrales nucléaires dans les cours d’eau, a fait parler de lui. Si près de 10 millions de Français sont concernés par une pollution radioactive de l’eau potable, la présence de tritium est aujourd’hui considérée sans risque pour la santé par les différentes autorités. Sur la carte de France, la région angevine apparaît comme étant la plus impactée par cette pollution, avec 54.1 Bq/l relevé en 2019.

Une enquête déclenchée à partir de 100 Bq/l

« Plusieurs centrales nucléaires sont le long de la Loire. Ces centrales sont autorisées à rejeter des éléments radioactifs dans l’environnement, dont le tritium qui ne peut pas être filtré. En aval des centrales nucléaires, le tritium est présent en plus grande quantité », explique Julien Syren, codirecteur de la Criirad, association qui a vu le jour après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl.

Le taux de Becquerel (Bq) relevé dans la région angevine est largement au-dessus du bruit de fond de 2 Bq/l. Les autorités sanitaires surveillent très régulièrement la quantité de tritium dans l’eau, mais ne déclenchent d’enquête qu’au-delà de 100 Bq/l. Il faut dire que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une valeur guide de concentration dans l’eau à ne pas dépasser de 10 000 Bq/L.

Du tritium retrouvé dans les urines

« Les taux mesurés ne sont pas un problème de santé publique, il ne faut pas être alarmiste, indique Julien Syren. Ils représentent toutefois une pollution de l’eau. Même si ce sont de faibles doses, quelqu’un qui va boire de l’eau du robinet particulièrement contaminée, sera davantage exposé au tritium ». Il y a quelques mois, Mediapart a commandé une étude au laboratoire de la Criirad. Celle-ci a permis de retrouver du tritium dans les urines de personnes consommant de l’eau dans des zones où se trouvait cet élément radioactif en quantité suffisamment importante.

« En 2019, une analyse que nous avons menée montre que la limite de 10 000 Bq/L imposée par l’OMS représente une sous-évaluation des risques par rapport à d’autres types de polluants. Il faut savoir que le risque lié au tritium est assez mal connu. La probabilité que le tritium entraîne des cancers est très faible, mais elle n’est pas nulle », poursuit le codirecteur de la Criirad.

Dans son enquête, Mediapart cite la conclusion de deux chercheurs, Timothy Mousseau et Sarah A.Todd, de l’Université de Caroline du Sud (États-Unis), qui ont analysé 250 publications scientifiques : « Contrairement à l’idée répandue que le tritium est une source relativement anodine d’irradiation, la grande majorité des études indiquent que l’exposition, en particulier interne, peut avoir des conséquences biologiques, en abîmant l’ADN, en causant des dégâts physiologiques et du développement, en réduisant la fertilité et la longévité, et en élevant le risque de maladies, y compris de cancers. »

« Il n’est pas question d’arrêter de boire de l’eau du robinet »

Julien Syren rappelle qu’en 2013, « des députés européens avaient proposé d’abaisser la valeur de 100 Bq/l, qui doit permettre de déclencher une enquête, à 20 Bq/l. Ce n’est finalement pas ce qui a été décidé. En matière de radioactivité, il est toujours difficile de fixer une limite. Pour nous, à partir du moment qu’il y a une pollution, il serait intéressant de mener une enquête. Certes, nous ne sommes pas dans le cas d’une exposition importante à de la radioactivité. Il n’est pas question d’arrêter de boire de l’eau du robinet. Par contre, ce n’est pas possible d’évacuer le sujet d’un revers de manche ».

La Criirad s’inquiète également des conséquences sur l’eau potable en cas d’accident nucléaire.

Les cartes de pollution au tritium sont accessibles sur le site internet de la Criirad.

Par Sylvain Réault.

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