L’humoriste belge Laura Laune jouera jeudi soir son dernier spectacle « Le diable est une gentille petite fille » au Centre de congrès d’Angers. Rencontre avec la gagnante de la douzième saison de « La France a un incroyable talent ».
Vous aviez 11 ans lors de vos premiers pas sur scène. Le théâtre a-t-il été un déclic ?
Laura Laune : « J’étais très timide dans la vie de tous les jours et mes parents m’ont inscrite à des cours de théâtre, de dessins, de piano… Le théâtre a été une révélation. Sur scène je n’avais plus cette timidité que j’avais dans la vie de tous les jours, j’avais vraiment ce sentiment d’un espace de liberté où ont m’écoutait et où je pouvais dire ce que je voulais. Rapidement je me suis dit que c’était ce que je voulais faire. »
C’était une forme de thérapie ?
« Oui même si je reste toujours assez timide dans la vie de tous les jours. Il y a un grand décalage entre la scène et le quotidien. Le public est souvent surpris à la fin du spectacle lorsque je le rencontre. On me dit parfois qu’on ne dirait pas la même personne (rires). »
Dans votre dernier spectacle, vous jouez un personnage un peu « trash », parfois attachant. Comment décrierez-vous ce spectacle ?
« C’est un personnage que je fais évoluer tout au long du spectacle. Mon attitude sur scène c’est un peu moi mais de façon exagérée. J’extrapole le côté naïf, innocent et très timide que j’ai dans la vie de tous les jours avec des propos qui contrastent avec cette apparence. J’aborde de nombreux sujets de société. Je parle aussi bien de racisme, d’homophobie, de religions, des attentats ou encore d’éducation. »
Quelles sont vos sources d’inspirations ? Avez-vous des modèles d’humoristes ou de comédiens qui continuent de vous inspirer aujourd’hui ?
« Pas tellement car je ne regardais pas beaucoup d’humour étant plus jeune. C’est venu vraiment petit à petit. Lorsque j’ai commencé à être humoriste je me suis intéressée à ce qui se faisait dans l’humour. Je suis assez fan de l’humoriste australien Jim Jefferies. J’aime bien le fait de monter sur scène pour faire passer des messages et non pas uniquement pour faire rire. »
Comment s’est passé l’écriture du spectacle ?
« J’écris seule et ensuite j’échange avec Jérémy Ferrari qui est mon producteur. C’est un peu mon garde-fou. Je lui envoie tout ce que j’écris et il me dit ensuite ce qui est bien ou ce qu’il faudrait retravailler ou enlever. Je trouve que c’est important quand on fait ce type d’humour que les gens sachent que ce sont des choses qui viennent de moi. »
A quel moment avez-vous commencé à écrire ce spectacle ?
« J’ai commencé il y a assez longtemps mais il s’est écrit petit à petit. La première version j’ai dû la jouer il y a peut-être cinq ans puis il a évolué jusqu’à avoir la version que je propose aujourd’hui. Parfois encore le spectacle évolue. »
Vous l’adaptez selon l’actualité ou le lieu dans lequel vous êtes ?
« Souvent je fais un clin d’œil dans les villes dans lesquelles je joue. Lorsque j’arrive sur place je me renseigne sur les traditions et les spécialités de la ville. J’essaie de faire une petite adaptation personnalisée en fonction du lieu. »
Vous faites souvent des apparitions à la télé qui sont assez remarquées. Est-ce que c’est votre façon d’être ou il y a parfois l’envie de faire du buzz ?
« C’est simplement ce qui me fait rire. C’est un peu comme dans mes spectacles où je peux insulter les gens dans la salle ou la France dans mes chansons, mais pour moi ça a un côté sympathique que l’on peut retrouver avec ses amis. J’aime bien dans mes spectacles ou à la télé taquiner les autres et ça reste bon enfant. Parfois il y a des gens qui peuvent être choqués dans le public que l’on puisse rire de telles ou telles choses. J’entends et je respecte mais globalement ça se passe toujours bien. »
Vous faites beaucoup de festivals. Est-ce qu’il y a parfois de la compétition entre humoristes ?
« Comme il y a énormément d’humoristes et qu’il n’y a pas forcément de la place pour tout le monde, on sent parfois un peu d’animosité entre les uns et les autres. Certains veulent avoir leur nom en plus gros sur l’affiche ou plus de temps de passage sur scène. Je ne suis pas du tout dans cette optique, j’ai un peu horreur de ça. J’ai toujours détesté tout ce qui était compétition. On fait chacun des choses tellement différentes que finalement je ne ressens pas la compétition. Ce que je fais c’est propre à moi. J’aime beaucoup les festivals car on est tellement seul en tournée que lorsqu’on arrive dans un festival et que l’on partage la scène tous ensemble, je trouve ça hyper chouette et enrichissant. »
Est-ce qu’on peut rire de tout selon vous aujourd’hui ou êtes-vous plutôt de ceux qui pensent que c’était mieux avant ?
« J’ai l’impression de pouvoir dire ce que je veux sur scène et que les gens comprennent. Je ne pourrais jamais dire que l’on ne peut plus rien dire car je dis ce que je souhaite. Les gens disent souvent que ça fait du bien de voir quelqu’un qui se permet de dire tout ça. Les spectateurs me disent souvent : « c’est notre humour à nous, de la vie de tous les jours ». A la télé ou à la radio ça peut-être plus compliqué. Il faut se souvenir que Coluche ou Desproges se sont aussi fait critiquer et censurer. Selon moi, il faut se battre pour cet humour là. Ça m’est souvent arrivé que l’on me dise « tu peux passer dans notre émission mais il faut enlever telles ou telles blagues ». Je n’accepte pas la censure donc soit on me prend avec mon humour, soit je ne viens pas, même si je dois moins passer à la télé ou à la radio mais au moins je me fait connaître pour ce que je suis vraiment en étant sincère. Si on me coupe à la télé, je passe par les réseaux sociaux et j’ai souvent plus de vues que les audiences de l’émission à laquelle je devais participer. Avec les réseaux sociaux on peut directement toucher le public. C’est une vraie chance. »
On vous a découvert avec l’émission « La France a un incroyable talent ». Que vous reste-t-il de cette expérience ?
« J’ai gardé le contact avec quelques candidats et j’ai parfois des appels de la production pour me demander de passer dans l’émission. J’ai un très bon souvenir de cette aventure. »
Vous avez également participé à « On ne demande qu’à en rire ». Quel regard portez-vous sur ces émissions de critiques d’humoristes ?
« Je pense que c’est toujours chouette lorsqu’un média vous donne la chance de s’exprimer et de se faire connaître. Il faut cependant savoir bien l’utiliser et être intelligent dans ce que l’on propose. Il faut savoir comment ça fonctionne pour ne pas tomber dans les pièges. Ce n’est pas toujours facile lorsqu’on débute. C’est un peu comme « La France a un incroyable talent », beaucoup de gens critiquent l’émission mais ça m’a énormément aidé. J’ai pu proposer ce que je voulais sans être coupée ni censurée. Quand on manque d’expérience c’est un peu casse gueule comme lors de mon passage à « On ne demande qu’à en rire ». »
Vous serez bientôt dans le prochain film de Kheiron « Brutus vs César ». Est-ce que vous avez d’autres projets ?
« Ça sera vraiment un tout petit rôle. J’ai beaucoup de propositions de cinéma et j’ai refusé pas mal de choses parce qu’on me proposait toujours des rôles un peu clichés de la « blonde un peu idiote » et je ne voulais pas aller dans ce créneau là. Pour l’instant, j’accepte que des rôles qui me plaisent même si ce sont des petits rôles. Je vais jouer également un petit rôle dans le dernier film d’Olivier Van Hoofstadt, le réalisateur de Dikkenek. »
Un message pour nos lecteurs ?
« Il faut surtout venir avec du second degré et laisser les enfants à la maison (rires) ! »
Spectacle complet