Dans le Maine-et-Loire, plusieurs structures dénoncent un « délabrement » de la protection de l’enfance, tant en termes de moyens humains que financiers.
La situation de la protection de l’enfance en France suscite de nombreuses interrogations. Le Maine-et-Loire est souvent évoqué comme un exemple des défis rencontrés par ce secteur, c’est notamment le cas dans le rapport Sichel, inspiré par le département. Entre augmentation des besoins, manque de moyens et difficulté à répondre aux attentes, les professionnels et les syndicats expriment leurs inquiétudes.
Une hausse des signalements et des besoins
Pour l’association Thermoutis, la protection de l’enfance traverse une période de fragilité : « Il y a un malaise concret voire un délabrement dans la protection de l’enfance tant sur la France hexagonale que sur les départements et territoires d’Outre-Mer. Les professionnels sont désemparés en constatant qu’une institution censée protéger ait pu devenir maltraitante », dénonce Sylvie Moreau, présidente de l’association.
Le département du Maine-et-Loire, comme d’autres territoires, fait face à une augmentation importante des signalements. En 2024, plus de 3 000 enfants étaient confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), contre 1 867 en 2014. Parmi eux, 217 ne disposaient pas de solution éducative ou d’hébergement adaptée.
Cette hausse des besoins entraîne une saturation des dispositifs existants : « Dans le Maine et Loire cela se traduit par des délais de 3 à 6 mois pour mettre en place une action éducative en milieu ouvert parce qu’en amont, les signalements éventuels de besoin de protection de l’enfance ne sont pas satisfaits que ce soit pour des mesures ou pour des soutiens d’aide à la fonction parentale ou pour des prises en charge éducatives à domicile, en établissements ou en familles d’accueil », poursuit Sylvie Moreau.
De leur côté, les syndicats CFDT et CGT pointent également une surcharge des structures d’accueil et des équipes. Actuellement, 361 enfants seraient en attente d’un lieu d’accueil dans le département. Certains seraient temporairement hébergés dans des hôtels ou des gîtes, des solutions jugées transitoires et non adaptées.
« 222 enfants sont en attente d’un accueil et 139 enfants sont en attente d’un Placement Educatif à Domicile. Pendant ce temps, ils sont laissés chez leurs parents de longs mois malgré leur besoin de protection constaté et acté par les juges des enfants », déplorent les syndicats dans un communiqué.
Cette situation a également un impact sur les enfants. Selon les syndicats, ces retards dans la prise en charge ne font « qu’accentuer le mal-être des enfants et entrainent une recrudescence de la violence chez ces derniers, liée souvent à des pathologies psychiatriques plus nombreuses chez les jeunes enfants. Ce phénomène vient, selon nous du défaut de prévention et de protection de ces derniers. À cela s’ajoute le manque de places en pédopsychiatrie et donc un défaut de soin ».
Des ressources insuffisantes
Pour les syndicats, le manque de moyens financiers et humains est également à déplorer. En 2024, « 30 postes ont été gelés dans le département, dont 7 dans le secteur social, soulignent les syndicats. Pendant plusieurs mois, faute de budget suffisant, les interventions de travailleuses familiales au titre de la prévention, ont été pour beaucoup, suspendues, laissant les parents démunis et leurs enfants sans accompagnement de proximité ».
En 2025, la suppression de « neuf postes d’évaluateurs-coordonnateurs » et le licenciement « de dix agents « vacataires » depuis une vingtaine d’année auprès des services de la Protection Maternelle et Infantile (PMI) » sont également annoncés « suite à la dénonciation de la convention entre de Département et la CARSAT, car ils n’arrivaient déjà pas à respecter les délais légaux de traitement des dossiers de prise en charge des personnes âgées et handicapées »
Ce contexte budgétaire rend difficile le recrutement de professionnels qualifiés et l’accompagnement des familles d’accueil, qui jouent pourtant un rôle clé. Ces dernières « sont en nombre insuffisant et épuisées, faute d’accompagnement suffisant ».
Une nécessaire coordination
Face à ces constats, des appels à une réorganisation globale se multiplient. L’association Thermoutis plaide « pour une approche systémique, impliquant l’État, les départements, les établissements, les professionnels et les familles » et « une démarche globale sans concession pour éviter de ne traiter que superficiellement des éléments sortis de leur réalité contextuelle ».
« Comment ne pas s’étonner de l’absence d’un ministère dédié à la protection de l’enfance qui serait en l’occurrence le pilote des transformations qui s’imposent aujourd’hui », se questionne l’association.
Les syndicats soulignent quant à eux « l’importance de renforcer les moyens humains et financiers pour éviter des solutions de court terme et répondre durablement aux besoins ».
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