Réemployer plutôt que jeter ? C’est la promesse de l’association angevine Matière Grise qui se consacre à la valorisation des matériaux du BTP à travers leur réutilisation. Depuis 2015, professionnels et particuliers font appel à eux pour penser autrement leurs constructions.
Le secteur du BTP génère en moyenne 230 millions de tonnes de déchets par an, soit environ 70 % des déchets en France (hors agriculture et sylviculture). En Pays de la Loire, on estime à 11,3 millions de tonnes le gisement de déchets du BTP, dont 10,1 issues des travaux publics et 1,2 du bâtiment.
Partant de ce constat, l’association Matière Grise, créée en 2015 par Cécile Portier et Pierre Mazin, se positionne comme un acteur clé dans la gestion des déchets de matériaux du bâtiment en privilégiant le réemploi.
« Seulement 1 % des matériaux de construction sont réutilisés. Ce que nous souhaitons c’est changer les pratiques et les mentalités, pour créer une filière, non plus de recyclage comme il en existe beaucoup, mais bien de réemploi », explique Laure Masson, chargée de projet à Matière Grise.
Plus de 600 tonnes réemployées
Depuis sa création, Matière Grise a réemployé plus de 600 tonnes de matériaux. En rassemblant un réseau actif de près de 1 000 professionnels, institutionnels et citoyens, Matière Grise continue de développer des solutions innovantes et reproductibles pour la massification du réemploi.
« L’association suit la déconstruction de bâtiments, établit un diagnostic, certifie et qualifie les matériaux puis propose des solutions », ajoute Laure Masson.
L’association offre donc des services d’accompagnement et de sensibilisation aux professionnels du bâtiment. Par des processus simples et sécurisés, Matière Grise met en relation directe les déchets du BTP avec les futurs utilisateurs, qu’ils soient particuliers ou professionnels.
« Nous mettons en relation les gisements de matériaux récupérés lors de constructions ou de déconstructions de bâtiments avec des utilisateurs potentiels, notamment des maîtres d’ouvrage, des collectivités publiques ou des entreprises, mais également des particuliers lors de chantiers participatifs. Cette mise en lien directe limite les besoins de transport intermédiaire et garantit une empreinte carbone nulle », décrit la chargée de projet.
Un acteur impliqué localement
Parmi les chantiers de l’association, on retrouve la rénovation d’Emmaüs de Saint-Jean-de-Linières où un parquet massif en châtaignier, des poutres en lamellé collé issues de la patinoire du Haras et des fenêtres déclassées suite à une erreur de cotation, ont été réutilisés.
Matière Grise était également présente lors de la déconstruction de la piscine de Belle-Beille, où l’association a été missionnée par la ville d’Angers pour récupérer un maximum d’éléments de la piscine lors d’un démontage participatif.
Plus récemment, l’association a également œuvré sur la démolition de l’Ehpad des Noisetiers sur lequel 20 tonnes de matériaux ont été déposés pour être remployés, ce qui correspond à 400 m² de bardage extérieur et 150 m² de faux plafond.
« L’un de nos meilleurs réemplois était peut-être pour Emmaüs Thouars en 2021 où nous avons supervisé le démontage, le transfert, le stockage et la repose de tous les arbalétriers d’une charpente bois. C’est un chantier ambitieux, qui intègre des matériaux de réemploi, de la charpente aux fenêtres en passant par les portes et les revêtements de cuisine », se souvient Laure Masson.
Sensibiliser au réemploi
L’association organise aussi plusieurs types d’événements et de services pour promouvoir le réemploi comme des Journées Éphémères du Réemploi (JER).
Matière Grise propose également des diagnostics PEMD (Produits Équipements Matériaux Déchets), de l’expertise et du conseil, ainsi que des recherches de débouchés et opérations de transfert de matériaux. Pour les professionnels souhaitant intégrer des matériaux de réemploi dans leurs projets, l’association offre un accompagnement complet, incluant des études de faisabilité, la sensibilisation des équipes, et le suivi de chantier.
Pour la chargée de projet, « il y a eu beaucoup d’évolutions dans le secteur du bâtiment sur le réemploi depuis vingt ans. Ce que l’on souhaite développer à l’avenir, c’est un automatisme chez les acteurs du BTP pour nous intégrer le plus tôt possible dans leur processus. On part de très loin, donc l’évolution peut paraître lente, mais elle avance ».
Par Eline Vion.
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