Depuis six ans, la ville d’Angers est touchée, comme de nombreuses autres villes étudiantes, par une pénurie de logements. Cette rentrée 2023 n’a pas fait exception à la règle imposant un véritable parcours du combattant aux étudiants.
L’augmentation du nombre de formations et l’arrivée de nouvelles écoles a entraîné une forte tension sur le marché de la location à Angers ces six dernières années. En 2015-2016, la préfecture de Maine-et-Loire accueillait 39 220 étudiants. Cette année, ils seront 46 000 à étudier dans les différentes écoles et universités de la ville. Une hausse conséquente qui intervient dans un contexte de tension du marché locatif dans les grandes villes françaises depuis deux ans.
Selon le magazine L’Etudiant, qui se base sur des chiffres fournis par LocService, il faut compter 3,85 demandes provenant d’étudiants pour une offre de location à Angers. Une demande nettement supérieure à des villes comme Nantes (2,48), Montpellier (2,46), Paris (2,34), Marseille (1,34), Toulouse (0,85) ou encore Grenoble (0,38). Du côté des loyers, un étudiant angevin paie en moyenne 431 euros pour un studio. Presque autant qu’à Rennes (453 €), mais plus qu’à Tours (426 €) ou au Mans (371 €).
De nombreux étudiants sans solution
« La situation est stable par rapport aux années précédentes », expliquait le président de l’Université d’Angers, Christian Roblédo, le mois dernier. A la rentrée, une centaine d’étudiants étaient sans aucune solution de logement ou dans une situation très précaire. « Des chiffres qui ne traduisent pas forcément la réalité du terrain », estime Laurent Bordet, vice-président de l’Université d’Angers en charge de la vie des campus.
L’Université d’Angers travaille main dans la main avec le Crous pour accompagner les étudiants en difficulté. Huit assistants sociaux suivent ces étudiants et tentent de trouver les solutions les plus adaptées, parfois en payant des nuits d’hôtel et si besoin, en complément, en fournissant des chèques alimentaires.
80 % des étudiants déclarent avoir rencontré des difficultés pour se loger
A Angers, le nombre de logements du Crous s’élève à 2 470, permettant d’héberger seulement 5,4 % des étudiants, soit la moitié de la moyenne nationale. Une enquête sur les conditions de vie étudiante menée par l’Université d’Angers en 2022-2023 montre que 80 % des étudiants déclarent avoir rencontré à un moment des difficultés pour se loger. Si le logement n’est pas la compétence de l’université, cette dernière s’est associée à la plateforme Studapart pour offrir des solutions supplémentaires aux étudiants à la recherche d’un toit. Il s’agit d’un service gratuit qui a comme objectif de centraliser toutes les offres, de faciliter les démarches des étudiants, et de prioriser leurs demandes auprès des résidences, propriétaires et agences.
« Ce n’est pas une spécificité angevine. Toutes les villes universitaires sont aujourd’hui concernées par cette pénurie de logements. La différence, c’est qu’à Angers, c’est une situation qui dure depuis un peu plus longtemps », souligne Laurent Bordet.
Des situations précaires
À l’Université Catholique de l’Ouest, un service logement met en relation des propriétaires qui proposent aussi bien une chambre, un appartement meublé ou vide, avec des étudiants de l’université. « Nous visitons chaque logement avant de les proposer à nos étudiants. Ce sont des logements qui sont proches de la Catho », indique Dominique Le Gal, responsable du service logement. Ce service, qui existe depuis plusieurs décennies, a dû s’adapter à l’évolution du marché immobilier angevin.
« Avant, les jeunes ne voulaient pas forcément de chambre chez l’habitant. Aujourd’hui, ils n’ont plus le choix. Nous avons beaucoup plus de demandes que de biens, avec une évolution marquée depuis 2018. En cette rentrée, il y a des étudiants qui n’ont pas trouvé de logement qui font la route depuis Nantes ou Le Mans. Certains sont chez des amis ou dans un Airbnb. Ce ne sont pas des solutions pérennes », déplore Dominique Le Gal qui comptait le mois dernier une cinquantaine d’étudiants sans solution ou mal logé.
« Les agences ne regardent même pas mon dossier »
Étudiante à l’Université d’Angers sur le campus de Saint-Serge, Léa (prénom d’emprunt) a commencé à chercher un logement sur Angers début juin. « Le 5 juin, il n’y avait déjà presque plus aucun logement. Les prix étaient exorbitants », raconte la jeune femme. Un peu par hasard, elle trouve une colocation partagée avec neuf autres étudiants dans une maison à Saint-Barthélémy-d’Anjou. Pour 17 m², elle paie chaque mois 370 euros. « Pour s’isoler, il n’y a que la chambre. Ce n’est pas l’idéal d’être dix dans une maison. Avec le bruit, il est parfois difficile de réviser », poursuit la néo-angevine.
Après avoir trouvé un travail en parallèle de ses études, Léa n’arrive pas aujourd’hui à trouver un logement qui pourrait lui permettre de poursuivre son parcours scolaire sereinement. « Avec 900 euros de revenus, les agences ne regardent même pas mon dossier. Du côté des particuliers, il y a une très forte concurrence. En seulement quelques heures, le logement est déjà parti ».
Nino a quant à lui été trois ans étudiant à Angers avant de poursuivre ses études à Saumur : « A Angers, j’ai dû vivre en sous-location. Ce n’était pas légal. Malheureusement, je n’ai pas pu trouver d’autres solutions. J’ai fait beaucoup de visites, mais il y avait de nombreuses arnaques ou des biens délabrés. Comme je n’étais pas boursier, le Crous ne considérait pas mon dossier comme prioritaire ».
Par Sylvain Réault.