Depuis septembre 2021, parents et enfants se retrouvent tous les mois lors d’un temps d’échange autour de la lecture et de l’interprétation d’albums jeunesse dans leurs langues.
« Une histoire dans ma langue », c’est le nom de cette initiative en plein cœur du quartier de Monplaisir qui réunit parents, enseignants et enfants autour de la littérature jeunesse. Dans ce café des parents de l’école Paul-Valéry, on y interprète des livres pour enfants dans les langues parlées à la maison.
« L’idée du projet est née d’un questionnement de près de huit ans, lors de lectures partagées entre parents et enfants menées par l’association Toile d’Éveil. On a constaté qu’il y avait beaucoup d’interactions autour de la lecture d’albums notamment lorsque des traductions sont proposées », indique Delphine Nizou, directrice de l’école maternelle Paul-Valéry.
Cette action, à l’initiative des enseignants et de l’association Toile d’Eveil, est portée par la Cité Educative avec le soutien de la Ville d’Angers.
Mettre en avant le plurilinguisme
Tous les premiers jeudis du mois, plusieurs parents se réunissent accompagnés de leurs enfants, afin de participer au projet. Parmi eux, Dayrole est présente depuis près de trois ans aux échanges : « On ne trouve pas de livres dans notre langue natale à lire à nos enfants. Participer à ce projet est très intéressant pour partager notre culture et rencontrer d’autres parents qui font face aux mêmes problématiques que nous », témoigne-t-elle.
En partenariat avec la bibliothèque de Monplaisir, l’équipe pédagogique sélectionne plusieurs livres jeunesse facilement traduisibles, avant de les proposer aux parents. Une manière de contribuer au renforcement des liens entre l’école, les parents et les enfants.
« Parfois, certains mots ou concepts en français n’existent pas dans la langue maternelle, nécessitant alors une interprétation alternative. Les parents font parfois appel à des parents ou des proches au pays pour trouver le mot ou la formulation la plus adaptée. Il y a énormément de partage et chacun apporte son expertise », décrit Lucie Durand, enseignante auprès des élèves allophones et coordinatrice du CASNAV.
Chaque livre traduit bénéficie également d’une version audio accessible via un QR Code sur la couverture, permettant ainsi une meilleure accessibilité pour les enfants et les familles et de « travailler à la fois la lecture et la diction ». Édités en trois exemplaires, les livres sont ensuite partagés en classe ou à la bibliothèque de Monplaisir.
« Une aventure humaine »
Au-delà de l’aspect linguistique, cet atelier a également permis aux participants de créer des liens forts entre eux, favorisant ainsi la découverte et le partage des cultures : « C’est une aventure familiale et humaine avant tout. Elle permet de secouer les idées reçues sur la langue française et de changer les regards sur les langues maternelles », explique Aline Guérin, lectrice à Toile d’Éveil.
« On voit les bénéfices sur le climat scolaire pour les enfants. Cette expérience a conduit certains parents à découvrir les langues maternelles des autres participants, de constater des similarités entre elles, et même de parler ouvertement de sujets sociétaux, d’avoir des débats », ajoute Delphine Nizou.
Depuis le lancement du projet en septembre 2021, plus d’une cinquantaine de livres ont été traduits dans une trentaine de langues différentes et sont disponibles à la bibliothèque Monplaisir. Ce projet est observé par Florence Lacroix, chercheuse au CREN, qui mesure l’impact de l’action.
Par Eline Vion.