Ce centre de ressources lutte contre l’illettrisme et lève ses tabous
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Ce centre de ressources lutte contre l’illettrisme et lève ses tabous

À Angers, l’association IFRAESS vient d’obtenir la reconnaissance officielle de son Centre Ressources Illettrisme (CRI 49), unique en Maine-et-Loire. La structure a pour objectif d’accompagner celles et ceux qui, malgré une scolarisation en France, peinent à lire, écrire ou compter.

Nicolas Viau est le directeur de l’association IFRAESS. – © Angers.Villactu.fr

Depuis le 21 janvier 2025, le Centre Ressources Illettrisme 49 (CRI 49), coordonné par l’Institut de Formation et de Recherche des Acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire (IFRAESS), est officiellement devenu le premier centre départemental de la région des Pays de la Loire.

Une consécration pour cette structure engagée depuis 2019 dans la lutte contre l’illettrisme, un phénomène qui touche encore 4 % de la population française âgées de 18 à 64 ans, soit environ 1,4 millions de personnes, selon l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI).

Des solutions adaptées à chaque parcours

« L’illettrisme est une problématique qui passe sous les radars, alerte Nicolas Viau, directeur de l’IFRAESS. Les personnes concernées n’osent souvent pas en parler, par honte ou par peur du regard des autres ».

Contrairement aux difficultés liées à l’apprentissage du français chez les personnes étrangères, l’illettrisme touche des adultes qui ont été scolarisés en France mais qui n’ont pas acquis une maîtrise suffisante de la lecture ou de l’écriture.

L’association IFRAESS propose un accompagnement sur mesure, loin des formats scolaires traditionnels. « L’objectif est de redonner confiance aux personnes, en s’adaptant à leurs besoins », explique Nicolas Viau. Accompagné par une équipe d’une vingtaine bénévoles, encadrée par Mallorie Bissirier, chargée de mission illettrisme, chaque bénéficiaire suit un parcours individualisé : « Ce sont souvent des personnes qui ont un rapport compliqué à l’apprentissage. Il faut donc les remettre en confiance », poursuit-il.

L’accompagnement proposé se décline en plusieurs étapes. Dans un premier temps, un suivi individuel est privilégié, à raison d’une à trois heures par semaine. Progressivement, les bénéficiaires peuvent rejoindre des ateliers collectifs avant, dans certains cas, d’intégrer des formations professionnelles. « Nous travaillons en lien avec des chantiers d’insertion et des entreprises pour adapter les formations aux besoins des travailleurs, précise Nicolas Viau. Au total, les suivis peuvent aller de six mois à trois ans, selon les besoins ».

« Lever les tabous »

Le label décerné par l’ANLCI vient renforcer la légitimité du CRI 49 et son travail auprès des acteurs locaux. « Nous sommes aujourd’hui le seul centre départemental dans la région, souligne Nicolas Viau. Cette reconnaissance nous donne une plus grande visibilité ».

Au-delà du soutien aux bénéficiaires, le centre joue un rôle clé dans la sensibilisation du public et des professionnels. « Nous formons les travailleurs sociaux, les missions locales et les entreprises à mieux repérer les signes de l’illettrisme », indique-t-il.

Avec la dématérialisation croissante des démarches administratives, l’accès aux droits devient de plus en plus complexe pour les personnes en difficulté avec l’écrit. « Prendre un rendez-vous à la CAF, comprendre un courrier de Pôle emploi… Tout est plus compliqué quand on est dans leur situation », déplore Nicolas Viau.

Des stratégies d’évitement, comme oublier ses lunettes pour éviter de lire un document, peuvent alerter : « Plus on en parle, plus on a de chances d’aider ces personnes à retrouver une autonomie. »

En 2024, le centre a accompagné 140 personnes, un chiffre en augmentation constante. Mais face aux besoins estimés, soit entre 3 000 et 4 000 personnes en situation d’illettrisme à Angers, la structure reste sous-dimensionnée. Face à ces enjeux, l’association mise sur la mobilisation des citoyens. « La lutte contre l’illettrisme n’est pas seulement notre affaire, c’est une responsabilité collective, insiste le directeur. Il faut lever les tabous et montrer qu’il n’est jamais trop tard pour apprendre. »

Le centre reste ouvert à toute personne en difficulté ou à tout proche souhaitant l’aider. Un numéro vert est également disponible : 0 810 011 135.

Par Eline Vion.

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