La caravane de la freepicerie a reçu une nouvelle visite de la police municipale le 15 octobre dernier à Belle-Beille. Après avoir été expulsé de Monplaisir et de la Roseraie, le collectif redoute une nouvelle interdiction de stationnement et de ne plus pouvoir continuer les distributions.
Pommes de terre, courges et autres légumes de saison sont exposés sur un étal devant la caravane. Idéalement placée devant l’entrée du restaurant universitaire, la caravane attire de nombreux curieux qui viennent se servir à prix libre.
Depuis trois ans, cette épicerie solidaire et itinérante permet à de nombreux étudiants de se nourrir plus facilement. « Nous avons changé la façon dont nous faisons nos courses. Nous allons à la freepicierie le mardi, puis on complète avec d’autres magasins », explique Oyana, étudiante à Belle-Beille.
Cette épicerie solidaire a été créée par un collectif au sein du squat de la Grande Ourse, expulsé en janvier 2021, puis dans le local de l’Étincelle. En 2021, suite à la fermeture du local, les bénévoles de la freepicerie décident de se lancer dans une épicerie ambulante.
Une caravane ambulante qui se déplace au plus près des gens dans le besoin
À Belle-Beille, les distributions ont débuté sur les places de parking, devant la Faculté des lettres, langues et sciences humaines. Après des discussions entre des élèves membres du collectif et l’université, la caravane a eu l’autorisation de s’installer directement devant le restaurant universitaire. Depuis la rentrée, l’épicerie ambulante distribue tous les mardis de 11 h 30 à 13 h 30, des légumes, des vêtements et des produits d’hygiène à prix libre.
Pour le collectif, le projet de la freepicerie n’est pas juste une action de charité. Leur projet est double : faire en sorte que les gens se réapproprient leur alimentation et installer une solidarité qui permette à tout le monde de manger à sa faim. L’idée est de faciliter l’accès à de la nourriture de qualité pour les personnes dans le besoin. Pour cela, ils se fournissent majoritairement au Jardin de Cocagne angevin, qui s’occupe de récolter, puis de distribuer des légumes à différentes associations.
Lorsqu’on vient faire ses courses là-bas, pas besoin de fiches de revenus ou de quotient familial. Pour Titou, membre du collectif, « les gens savent ce dont ils ont besoin et ce qu’ils sont en capacité de donner en retour pour manger ». La freepicerie souhaite se placer complètement en marge de l’économie marchande et commerciale.
Un statut qui pose problème à la mairie d’Angers
Depuis le lancement de leur épicerie ambulante, la police serait venue contrôler la caravane une dizaine de fois. Le dernier contrôle en date a eu lieu le 15 octobre dernier, lors d’une distribution sur le campus de Belle-Beille. Cette fois-ci, aucune conséquence, le collectif a un accord avec l’université et possède une autorisation de stationnement.
Les membres de la freepicerie ont fait part de leur indignation dans un communiqué publié le 22 octobre sur Instagram. Le collectif regrette « un harcèlement toujours plus important de la part de la police municipale ».
Pourtant, depuis le début, la position de la Ville est la même. Cette dernière souhaite en effet que le collectif se régularise en constituant une association. Sans une autorisation de stationnement délivrée par la Ville, la freepicerie n’a pas le droit d’effectuer ses distributions sur la voie publique.
En 2023, Jeanne Behre-Robinson, adjointe à la sécurité, expliquait dans les colonnes de Ouest France : « Il y a des règles, ce sont les mêmes pour tout le monde. On ne s’installe pas sur le domaine public comme on veut. »
La solution à ce conflit peut paraître simple, mais le collectif ne souhaite pas fonder d’association. Selon eux, il n’y a pas de raison de changer le fonctionnement de la freepicerie. « On n’a pas envie de rentrer dans un schéma associatif avec une comptabilité, on n’a pas forcément le temps de faire ça », explique Léo, membre du collectif.
Pour Titou, les quelques heures de distribution de légumes dans la semaine ne justifient pas un tel investissement. « Le plus important est la demande d’autorisation auprès de la mairie ou le fait de donner à manger aux gens ? », se questionne-t-elle.
Lutter contre la précarité étudiante
Léo dénonce l’absence de politique au sujet de la lutte contre la précarité étudiante, notamment sur la question du logement. « Aujourd’hui, de plus en plus d’étudiants rencontrent des difficultés à manger plusieurs repas par jour », rappelle le jeune homme. Dans son communiqué, le collectif s’en prend directement à la ville : « Nourrir les gens est une nécessité, réprimer celles et ceux qui le font est une honte ! »
Depuis plusieurs années, la précarité alimentaire des étudiants ne fait que grimper. Selon un baromètre publié à la rentrée 2024 par l’association Cop1, 36 % des étudiants sautent régulièrement un repas et seulement 18 % ont recours à l’aide alimentaire. « Les membres du collectif donnent beaucoup de leur temps pour nourrir les gens dans le besoin. On considère que c’est à l’État de remplir ce rôle, pas à nous », conclut Léo.
Article proposé par Julien Schott, en partenariat avec Radio Campus Angers.